Ce qui frappe le plus, quand on arrive dans l’ESAT Jean Moulin, c’est le silence. On n’entend aucun bruit et pour cause, cet ESAT a été créé en 1986 pour accueillir des personnes sourdes ou malentendantes s’exprimant en langue des signes. Actuellement il compte 45 personnes handicapées.
Martine Lejeau-Perry, la Directrice de Jean Moulin nous accueille, Marc Gaule et moi, dans des espaces assez lumineux où l’on effectue le conditionnement de pièces de couture et le traitement de courrier de grandes entreprises. Elle nous accompagne de table en table et nous présente aux usagers, ainsi qu’aux moniteurs d’ateliers. Il faut s’arrêter à chaque table pour une raison évidente : les usagers ne nous entendent pas arriver. Nous apprenons que la langue des signes est assez imagée et qu’elle permet d’identifier quelqu’un par la première lettre de son prénom et un signe distinctif : lunettes, barbe, grain de beauté…
La visite continue en traversant la rue et en découvrant le Café Signes. En entrant, on croit appareiller sur un navire où l’équipage est composé de sourds et d’entendants. En termes de décoration, de nombreux éléments rappellent un bateau au long cours. Il y a aussi un coin où l’on peut s’isoler entre malentendants quand on ne souhaite pas que les autres puissent voir votre conversation. Créé en 2003, le Café Signes a su s’intégrer dans ce quartier calme du 14ème arrondissement. Il a su également se faire connaître de beaucoup de sourds et malentendants qui sont contents d’entrer dans un lieu qui leur est dédié… Et ouvert sur les autres.
Martine Lejeau-Perry a l’énergie de ceux qui mènent leur projet à bon port tout en évitant les écueils. Elle sait que les ESAT se trouvent à la croisée des chemins, qu’il y a une nécessité vitale d’évoluer. Elle cherche ce qui pourrait être une piste d’évolution : la numérisation par exemple, très demandée par les grandes entreprises chez qui l’archivage est un sujet important. Le CAT Jean Moulin sait faire face aux défis qui se trouvent sur sa route, ceux du passé comme ceux du futur, et la réussite du Café Signes en est la preuve.
Philippe Sendek