Dans les coulisses du projet BD « Y’a pas de malaise ! » (2/2)

« Accompagner Charles dans la réalisation de sa BD a été une expérience très enrichissante »

Ancienne élève des Beaux Arts spécialisée dans le dessin animé, Alix Ronse a accompagné Charles, jeune auteur autiste repéré à Angoulême par l’association L’Hippocampe, dans la réalisation de ses planches pour la BD Y’a pas de malaise !. Une expérience enrichissante, menée dans le studio 2 Minutes. Témoignage.


J’ai rencontré Charles à l’occasion d’un stage qu’il effectuait au studio de dessin animé 2 Minutes au sein duquel je travaillais à Angoulême. J’étais alors chargée de lui enseigner les techniques du métier et nous avons immédiatement eu un bon contact. Charles est très attachant et lorsque j’ai été sollicitée à nouveau pour l’accompagner dans la réalisation de ses planches pour la BD Y’a pas de malaise !, j’étais ravie de le retrouver au studio. Il avait déjà remporté deux Prix au concours de Bande Dessinée destiné aux personnes en situation de handicap, qu’organise chaque année l’association L’Hippocampe, à l’occasion du festival d’Angoulême. Et c’est vrai qu’il a beaucoup de talent, d’autant qu’il n’a jamais suivi de cours de dessin ! Je crois qu’il était très fier d’avoir été retenu aux côtés de grands auteurs pour ce projet, d’où sa forte motivation. Nous avons d’abord défini ensemble ce qu’il voulait faire ou plutôt ce qu’il ne voulait pas faire. Ainsi, si l’éditeur Steinkis pensait au début qu’il pourrait réaliser une sorte de récit autobiographique, Charles était farouchement opposé à l’idée de se mettre en scène, et ne souhaitait pas du tout traiter du handicap psychique. Car bien que conscient de sa différence, il la rejette. C’est pourquoi il a préféré choisir un personnage en fauteuil roulant qui a cependant des points communs avec lui. Et Frank Margerin et moi-même jugions important de respecter ses aspirations. Il lui était aussi difficile d’aborder le thème emploi et handicap, car si Charles a effectué des stages, il ne connaît pas vraiment le monde du travail. Peu à peu, je l’ai aidé à formuler les idées qu’il avait envie d’exprimer et à structurer une histoire pour le scénario. Charles fait beaucoup de croquis, mais il n’écrit presque pas. Il perd souvent le fil de ses pensées, saute parfois des cases et comme je ne passais qu’une heure par jour auprès de lui, il n’était pas simple de respecter les délais. Mais au final, l’expérience a été enrichissante pour tout le monde. Travailler avec lui m’a ouvert des horizons et lui a vécu cette bande dessinée comme une reconnaissance. C’était son premier vrai job ! Il a suffi que je voie ses yeux pétiller pour comprendre combien il était content, même s’il ne l’exprime pas avec des mots.
Alix Ronse