Sciences Po : un engagement pour l’accessibilité universelle

Invité à Pass Pour l’Emploi, Sciences Po développe une politique très proactive dans l’accueil des étudiants en situation de handicap. Le point avec Nicolas Péjout, directeur de la formation continue, et Claire Secondé, chargée de Mission Handicap.

Nicolas Pejout - Sciences Po
Nicolas Pejout

Pourquoi avoir participé à Pass Pour l’Emploi ?

Nicolas Péjout : Sciences Po a des projets très concrets autour du handicap. Et nous sommes déterminés à poursuivre cette politique, puisqu’une responsable Handicap sera bientôt recrutée et directement rattachée au secrétariat général de Sciences Po. Il était donc naturel pour nous de participer à ce forum, une initiative dynamique. Nous n’avions aucune leçon à donner, mais plutôt des histoires et des expériences à échanger au travers de rencontres avec d’autres acteurs, dont les entreprises et les associations.

Qu’en retenez-vous ?
Nicolas Péjout : J’ai été frappé par l’enthousiasme des participants, candidats bien sûr, mais aussi recruteurs. Et je trouve intéressant de mêler des acteurs très différents qui convergent vers des objectifs communs et partagent cette même volonté de favoriser l’accessibilité du marché du travail. Enfin, j’ai apprécié l’absence d’angélisme dans l’approche du recrutement. C’était la première fois que nous participions à un forum dédié au handicap. Mais il me paraît aussi important de mettre en avant la dimension accessibilité dans les autres forums. Sciences Po organise un forum de recrutement chaque année et depuis l’an passé, un énorme effort a été entrepris en ce sens. Cela contribue à banaliser le handicap. Car à terme, il ne faudrait plus avoir besoin d’événement dédié, ni de sur-mesure.

Claire Secondé - Sciences Po
Claire Secondé

Comment se traduit concrètement l’engagement de Sciences Po en faveur du handicap ?
Claire Secondé : Depuis la direction de Richard Descoings, Sciences Po Paris a déployé le programme Sciences Po Accessible qui engage tous les salariés sur l’accessibilité, tant des cours que de l’accueil. De 15 étudiants en situation de handicap déclaré en 2008, nous sommes ainsi passés à une centaine. Nous avons aussi signé une charte sur le handicap en février 2013, laquelle engage tous les services de Sciences Po à suivre une programmation pluriannuelle avec des objectifs à atteindre, pour garantir un parcours accessible de l’étudiant, de l’entrée au collège universitaire à l’arrivée sur le marché du travail. Aide humaine, aménagement de l’emploi du temps… : l’accompagnement est adapté à chaque handicap, en tenant compte de l’histoire de l’étudiant, et nos premiers cycles délocalisés ont la même qualité d’accueil. Mais l’idée est de tendre vers une accessibilité universelle. Par exemple, depuis deux ans, trois cours en amphithéâtre et un cours en anglais sont sous-titrés en direct.  Nos entreprises partenaires dont la Société Générale nous accompagnent également sur des projets innovants, comme les bourses de mobilité handicap. Elles permettent à des étudiants de suivre une année d’études ou de stage à l’étranger, grâce à une prise en charge des frais supplémentaires induits par le handicap. Une compensation qui leur offre la liberté de partir partout dans le monde.
 
Quel est, selon vous, le frein majeur des jeunes en situation de handicap à poursuivre leurs études et à faire carrière ?
Nicolas Péjout : Pour moi, l’obstacle principal reste l’autocensure. Ces jeunes ont le sentiment, et parfois avec raison, que le système n’est pas accessible pour eux, à la fois parce qu’il est très sélectif et parce que leur scolarité a été très perturbée du fait de leur handicap. Un vécu et un ressenti qui les empêchent de se lancer, car ils pensent qu’aucun aménagement n’est possible dans l’enseignement supérieur.
Claire Secondé : Nos portes ouvertes montrent cependant que de plus en plus d’élèves et de familles sont informés qu’à Sciences Po, par exemple, l’accessibilité n’est pas un vain mot, et des lycéens y participent dès la seconde. Autre évolution : si nos étudiants en situation de handicap privilégiaient hier les formations les préparant aux concours de la fonction publique, ils se dirigent désormais de plus en plus vers des carrières dans le privé, et c’est aussi grâce aux efforts des entreprises pour venir vers les écoles et vers eux. Une relation de confiance est en train de s’établir : nous sommes à un moment-clef. Nous nous employons également, à travers un dialogue permanent avec les étudiants, à renforcer le lien avec nos entreprises partenaires et les DRH par des stages, pour permettre une insertion professionnelle. Sur notre portail Sciences Po Avenir, les entreprises handi-accueillantes publient ainsi leurs offres de stages et d’emplois. Rien, toutefois, n’est imposé aux étudiants.
 
Avez-vous d’autres projets ?
Claire Secondé : Nous voudrions installer partout des boucles magnétiques pour les étudiants sourds appareillés et, en plus du sous-titrage, proposer un service de traducteurs LSF (Langue des Signes Française) pour les sourds profonds non appareillés. À l’heure actuelle, nous avons des élèves malentendants appareillés. Et cette année, nous avons dû très vite mettre en place un dispositif pour une étudiante en Master, devenue sourde profonde brutalement à la suite d’une maladie. Pour conclure, je tiens à souligner que nos étudiants en situation de handicap font de très beaux parcours. L’année passée, trois d’entre eux ont obtenu des mentions Très bien et une a été major de promotion en Finances et Stratégies en 2012. Elle a d’ailleurs été recrutée par une de nos entreprises partenaires.