Vers la professionnalisation des Auxiliaires de vie scolaire (AVS)

Depuis le 29 juin 2014, un décret prévoit la professionnalisation des Auxiliaires de vie scolaire, chargés de permettre aux enfants en situation de handicap de suivre leur scolarité. Cette mesure permettra-t-elle d’améliorer le niveau de formation des personnes en situation de handicap, et faciliter ainsi leur recrutement par les entreprises ?
Sophie Cluzel, présidente de la Fnaseph (Fédération Nationale des Associations au Service des Élèves Présentant une situation de Handicap) nous apporte un éclairage sur les enjeux de ce métier si important pour la scolarisation des enfants.
AVS
En quoi consiste le métier des auxiliaires de vie scolaire (AVS), désormais rebaptisés Accompagnant des élèves en situation de handicap (AESH) ? Combien sont-ils aujourd’hui?
On compte aujourd’hui pas moins de 60 000 accompagnants, de la maternelle à l’université. C’est difficile de connaitre leur nombre exact du fait de la diversité de leurs statuts. Leur mission au sein de l’école s’articule autour de trois grands axes : L’aide à l’apprentissage scolaire, mais aussi l’aide à la vie sociale, et à la vie quotidienne, selon le niveau d’autonomie des enfants.
 
Pourquoi est-ce important de professionnaliser ce métier ?
La majorité des accompagnants ont un niveau bac +2, mais aucune formation spécifique n’est requise ni proposée. Nous demandons depuis longtemps que les AVS puissent recevoir un minimum de formation et d’informations pédagogiques.
C’est aussi un métier très précaire. Les contrats de travail avaient jusque-là une durée maximale de six ans. Le décret prévoit la possibilité de passer désormais en CDI, mais la pérennité se pose toujours pour un grand nombre d’AVS qui ont été recrutés en contrats aidés. Les salaires sont très bas. La plupart des AVS sont payés au smic et selon le nombre d’heures travaillées. Soit de 20 à 24 heures par semaine, pour un salaire tournant en moyenne autour de 680 euros par mois.
 
Le décret prévoit que les AESH devront être titulaire d’un diplôme d’aide à la personne, avec une spécialisation, qui va être créée, concernant l’accompagnement des personnes en situation de handicap. Cela répond-il à vos attentes ?
Cela répond à l’une de nos demandes concernant le besoin de formation des AVS. Cela devrait améliorer la prise en charge des enfants en primaire. Mais le problème est que cette formation obligatoire de niveau infra bac ne permettra plus de recruter des personnes qui ont un niveau bac et au delà. Au lycée, tant les accompagnants que les élèves risquent de se retrouver en difficulté en termes de niveau. Sans parler de l’université…
L’anticipation de l’exigence d’un diplôme spécifique, qui sera obligatoire à partir de 2016, pose dès maintenant un problème de recrutement sur le terrain. Depuis la rentrée, certains contrats de recrutement d’AESH ont été annulés au bout de 15 jours car ils ne remplissaient plus les nouveaux critères. Certains enfants se retrouvent actuellement sans accompagnement.
 
Existe-il aussi des accompagnants en entreprise ?
Le système éducatif ne prévoit pas d’accompagnement pour les stages en entreprise. C’est un gros problème pour les élèves de l’enseignement professionnel. Dans les centres de formation à l’apprentissage, beaucoup d’élèves se retrouvent en rupture d’accompagnement, avec un risque de rupture dans leur parcours de formation.
Les entreprises doivent se débrouiller seules. En cas d’embauche, il est possible de demander à l’Agefiph un accompagnement humain temporaire au moment de la création du poste. Mais il n’existe pas de dispositif pérenne. Or pour certains, notamment les handicaps psychiques, un accompagnement longue durée est parfois nécessaire.
 
Les AESH vont-ils, à terme, permettre d’améliorer le niveau moyen de formation des personnes en situation de handicap et leur employabilité?
Aujourd’hui les AESH permettent l’accès à l’école. Mais la continuité de l’apprentissage demeure problématique. Les entreprises peuvent aider nos associations à porter ce besoin d’aide humaine et de coordination sur la longue durée. Dans les lycées professionnels, il est très important que la coordination se fasse davantage avec les entreprises, pour assurer une continuité de l’accompagnement. Ensemble, nous pouvons peser sur le gouvernement pour encourager la mutualisation des financements et éviter les ruptures de parcours, de l’école à l’emploi.
 
Propos recueillis par Anne-Isabelle Barthélémy

Depuis quand existent les AVS ?

Les assistants de vie scolaire existent depuis une trentaine d’années, suite à une demande des instituteurs qui se rendaient compte que certains enfants en situation de handicap avaient besoin d’une aide spécifique pour suivre les cours. Des parents se sont organisés, seuls, en créant des associations et en recrutant des personnes pour accompagner leurs enfants à l’école. La création de la FNASEPH en 1996 a permis de fédérer ces associations dans l’objectif de professionnaliser le métier d’accompagnant et d’en faire un service public. En 2003, tous ces contrats d’accompagnants à l’école ont été transférés à l’éducation nationale. Puis la grande loi sur le handicap de 2005, qui insiste sur l’importance de la scolarisation des enfants en milieu ordinaire, a entrainé une hausse des recrutements. Beaucoup d’assistants ont aussi été recrutés ces dernières années en contrats aidés, pour une durée limitée.

Quelques chiffres sur la scolarisation des enfants en situation de handicap :

D’après le Ministère de l’éducation, le nombre d’enfants avec un handicap scolarisés en milieu ordinaire en primaire est passé de 89 045 en 2006, à 141 565 en 2013. Pour le niveau collège et lycée, la progression a été encore plus forte, puisqu’elle est passée de 28 789 élèves à 97 595. Néanmoins le Ministère explique lui-même que ce chiffre ne reflète pas exactement la réalité. Cette augmentation provient notamment de l’élargissement de la notion de handicap prévue par la loi de 2005. Un certain nombre d’enfants auparavant scolarisés, mais non considérés comme en situation de handicap, n’étaient pas comptabilisés en 2006 alors qu’ils le sont désormais. Certains enfants ne fréquentent aussi l’école que quelques heures par semaine.

En 2011, 15000 enfants étaient pris en charge dans des structures médico sociales, et 5000 étaient en « attente de solution ».

Source : Ministère de l’éducation

Pour en savoir plus :
Voir le site de la FNASEPH : www.fnaseph.fr
Voir la note du Ministère de l’éducation « un accompagnement efficace pour les élèves »